Voilà plusieurs mois que le « bruit » médiatique autour d’une pénurie de granulés de bois monte jusqu’à en devenir assourdissant. Dans le même temps de nombreuses confirmations de cet état de fait peuvent être observées sur le terrain : dépôts vides, difficulté à se fournir, prix à la hausse.
Pourquoi une pénurie aussi tôt dans la saison ?
Il y a, dans toute pénurie, un côté auto réalisateur. Des craintes se font jour (en partie justifiées), elles sont relayées, amplifiées et entrainent les consommateurs à acheter en anticipation, ce qui créé la pénurie dans certains endroits, accroit le sentiment de panique, etc… Plusieurs exemples remontent de particuliers qui ont déjà stocké la quantité de granulés nécessaire pour tout l’hiver (voire plus), au lieu de s’approvisionner régulièrement. Il est difficile de mesurer exactement l’ampleur du phénomène, et tout aussi difficile de le contrôler (de nombreux distributeurs contingentent les ventes, mais on ne peut empêcher les gens de faire le tour des distributeurs…) ; mais c’est indéniablement ce phénomène qui créé la pénurie actuelle. Voilà maintenant plusieurs mois que la filière bois produit des granulés comme jamais, et que pas un seul n’est consommé pour se chauffer, ils sont donc bien quelque part !
Y aura-t-il un vrai manque de granulés?
Les besoins en granulés connaissent une très forte croissance. Plusieurs raisons :
- D’abord l’augmentation du parc d’appareil de chauffage à granulés : d’après Observ’er, entre 2020 et 2021, les ventes de poêles à granulé ont augmenté de 41% et les ventes de chaudières à granulé de 120%, avec respectivement 180 000 et 32 000 pièces. C’est une situation positive puisque la filière du granulé fait partie intégrante du mix énergétique pour atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre.
- Ensuite l’augmentation de l’usage : même sur les prix actuels, le granulés reste significativement plus compétitif que les autres énergies, et les consommateurs ont logiquement tendance à utiliser davantage leurs appareils pour alléger leur facture
- Enfin, la forte demande de certains pays d’Europe (Royaume-Uni, Bénélux, Danemark) qui, face au prix élevé du gaz, font le choix d’intensifier l’usage de centrales électriques au granulé. C’est sans doute le phénomène le plus regrettable, puisqu’on utilise des granulés pour produire de l’électricité avec un rendement très nettement inférieur aux 90% d’efficacité d’un appareil de chauffage.
En parallèle, l’offre augmente significativement, en France notamment, mais selon les scenarios d’hiver envisageables, il faudra compléter par de l’importation sur la saison 2022-2023. Certaines solutions commencent déjà à apparaitre. A plus long terme, la production locale française la filière prévoit 1 million de tonnes supplémentaires réparties entre 2021 et 2024 et un doublement de la capacité de production d’ici 2028 (source ProPellet). Les trajectoires semblent donc pouvoir se rejoindre.
Le chauffage aux granulés de bois reste-t-il compétitif ?
Indéniablement oui. La différence de prix avec les autres énergies est amoindrie en France pour les particuliers à court terme, du fait du bouclier tarifaire. Malgré un gel des prix sur le gaz et l’électricité, le granulés demeure la solution la plus économique exception faite du bois bûche.
Si on prend les références de l’Allemagne (source Poujoulat), ce qui retire l’effet « bouclier énergétique », les prix tournent actuellement autour de 34 centimes d’euros le kWh pour le gaz, 18 pour le fioul, 16 pour la pompe à chaleur, 15-16 pour le granulé bois et 8 pour le bois bûche.
Alors, faut-il oui ou non hésiter à s’équiper d’un poêle ou d’une chaudière à granulés ?
Si on se met à la place de la personne équipée d’une chaudière fioul, sur le point de la remplacer par une chaudière à granulés et qui ne trouve pas de granulés disponible rapidement, on peut difficilement éluder la question ou la trouver non pertinente. Pour autant, il est plus que jamais pertinent de choisir le bois, y compris à granulés, comme solution de chauffage.
C’est une solution locale, durable, qui répond aux enjeux cruciaux d’autonomie énergétique des années qui viennent, et dont la filière est faite d’entreprises très pourvoyeuses d’emploi. Son coût restera compétitif, et la filière confirme sa capacité à accompagner une montée en charge dans les années qui viennent.
Certes à court terme, les tensions énergétiques à attendre sur l’électricité, le gaz, et dans une moindre mesure sur le granulé de bois, demandera à tous un comportement responsable : un chauffage et une consommation raisonnés et limités, pas de sur-stockage. Mais on le voit chaque jour, les professionnels de la filière bois sont « sur le pont » pour jouer leur rôle face au défi énergétique.